Apres un long absence je reprend ma plume sur un sujet qui me tiens à coeur.
Cher(e)s Djibnautes, nous assistons ces derniers temps, en Somaliland, aux prémices d’un soulèvement des populations de la province de Salal qui dénoncent les discriminations politiques, sociales et économiques dont elles sont victimes. Cette situation pourrait déboucher sur une guerre tribale aux conséquences désastreuses et qui, par effet domino, pourrait avoir des graves répercussions sur la cohabitation pacifique des communautés Djiboutiennes. Pour comprendre cette situation explosive, nous allons réaliser un petit bond en arrière dans l’histoire somalienne.
Naissance de la grande Somalie
Le 26 juin 1960, l'ancien protectorat britannique du Somaliland obtient son indépendance.
Le sud, sous protectorat italien accède à l’indépendance 5 jours plus tard, le 1er juillet 1960.
Les Somalilandais, à leur tête feu Mohamed Ibrahim Egal, désireux de former une grande famille somalienne décident de fusionner avec le sud. C’est ainsi que la république somalienne voit le jour, le 1er juillet 1960.
Le début du calvaire
Après des débuts prometteurs en matière de démocratie (1er alternance démocratique d’Afrique noire en 1967) feu Siyad Barre arrive au pouvoir après un coup d’état militaire.
Outre l’aspect autocratique de ce régime, se met en place progressivement une politique de hiérarchisation éthique dont la principale victime est la tribu des Issaks.
La région du Somaliland subit une discrimination politique, sociale et économique. Mais le plus dur restait à venir. Le régime met en place une politique d’expropriation des Issaks qui consistait à implanter massivement les Darods (ethnie de Siyad Barré) sur les terres des Issaks.
Le début de la révolte des Issaks
Les Issaks ressentirent amèrement le gout de l’ingratitude d’autant plus qu’ils étaient à l’origine de la naissance de la grande Somalie. Ils se mirent à militer pour réclamer leurs droits par les voies légales et pacifiques. Face à l’intensification de la répression dont ils étaient victimes, les politiciens Issaks, en 1er lieu Feu Egal, décidèrent de créer un mouvement armé, en l’occurrence le SNM (Somali National Mouvement). Ce dernier fut financé et entrainé par l’Ethiopie dont l’objectif principal était d’arracher le Somaliland du giron de Mogadishu. Tous les hommes Issaks en âge de combattre prirent la direction des maquis et entrèrent en clandestinité.
Issak Beni Ahmed, Issa Beni Ahmed
La répression allait crescendo et Siyad envoya ses chars et ses avions pour écraser la rébellion. La ville de Hargeisa fut entièrement détruite et garde encore les séquelles des bombardements. Commença ensuite une véritable chasse à l’homme des Issaks.
Par conviction politique, les Samarones (Gadaboursis), autre tribu de la Somaliland, appuyèrent l’armé de Siyad et prirent part à la répression des Issaks.
Isolés et condamnés à la défaite, ils réclamèrent l’aide des Issas, leurs frères les plus proches « généalogiquement » sur la scène tribale somalienne. C’était le temps du fameux slogan Issak Beni Ahmed, Issa Beni Ahmed poétisé par les artistes.
Aussitôt les Issas se jetèrent à corps et âme dans la bataille en sauvant leurs frères Issaks d’un génocide qui aurait conduit certainement à leur extinction.
La chute du régime de Siyad et la renaissance de la Somaliland
La force de frappe de la coalition des 2 principales tribus de la Somaliland, en l’occurrence les Issaks et les Issas, allait définitivement changer le cours des choses.
Le régime de Siyad tomba en 1991 et la Somaliland proclama sa sécession sur la base des frontières de l’ancien protectorat britannique avec Hargeisa comme capitale.
Les Issaks s’installèrent au pouvoir à Hargeisa et Feu Egal fut le 1er président de la Somaliland de 1993 à 2002.
De l’ingratitude à l’ingratitude
Les Issas payeront un lourd tribu dans la creation de la Somaliland moderne exactement comme en 1960 lorsque les Issaks initièrent la naissance de la grande Somalie.
Mais la déception des Issas sera à la hauteur des sacrifices qu’ils ont consentis pour libérer la Somaliland.
Les Issaks vont réserver aux Issas le sort que le régime de Siyad leur avait réservé auparavant. Les Issas sont systématiquement écartés du pouvoir au profit des Samarones jadis alliés de Siyad dans la répression des Issaks.
Les Issaks prennent la place de l’oppresseur Siyad Barré et les Issas prennent celui des oppressés Issaks: de l’ingratitude à l’ingratitude en somme.
La province de Salal (peuplée par les issas) est exclu de tous les programmes de développement. Ainsi, il n’existe aucune infrastructure publique (école, hôpital, puits) à Lughaya, à Zaylac, à Xariirad, à Gerissa, etc.…..
Salal : la Palestine des Issas
Mais le plus dur reste à venir : l’expropriation des Issas.
Elle consiste à implanter les Samarones sur les terres des Issas comme jadis Siyad tentait d’implanter les Darods sur les terres des Issaks. Cette expropriation se déroule en 3 phases :
1) Asphyxiée la province de Salal pour forcer les populations autochtones à quitter les lieux. Cette politique a été mise en place à partir de 1995.
2) l’implantation des Samarones à Salal. Cette installation est encouragée et cofinancée par le gouvernement Somalilandais et par la diaspora Gadaboursi.
3) Organiser des parodies d’élections pour légitimer la prise de Salal par des populations allochtones.
Les élections communales de novembre 2012 devaient couronner le plan en 3 étapes mis en place à Hargeisa et qui consiste à l’expropriation des Issas.
C’est ainsi que dans les 2 plus grande villes Issas à savoir Lughaya et Zaylac, la liste des Samarones, arrive en tête à la faveur d’une fraude massive pilotée depuis Hargeisa par le Vice- Président Somalilandais (gadaboursi).
Le début de la révolte des Issas
Les Issas goûtent à leur tour les saveurs de l’ingratitude. Excédés par tant d’injustices et de discriminations, les Issas commencent à se révolter. Cette a contestation part d’un lieu hautement symbolique : Zaylac, la Jérusalem des Issas.
On entend ces derniers temps des propos fantaisistes où les Samarones s’adonnent à un jeu dangereux qui consiste à la réécriture de l’histoire de la ville Zaylac.
Je ne vais pas rentrer dans la polémique stérile mais les observateurs les plus avisés souligneront qu’il est impossible que 19 Ugaas Issas soient couronnées à Zaylac si cette ville n’appartenait pas aux Issas.
Jusqu’ici, les Issas comme autrefois les Issaks, réclament leurs droits par les voies légales et pacifiques.
Et jusqu’ici, la réponse est la même que celle reçue par les Issaks autrefois. La manifestation pacifique des issas (voir video dans
http://www.youtube.c...?v=axucuo2wOLI) du 09/01/2013 a été réprimée dans le sang (2 morts, 15 blessés dont certains graves).
Un appel à la paix et la justice
Un proverbe édité dans la langue de Molière dit : Mieux vaut prévenir que guérir.
C’est dans cette optique que je m’adresse aux intellectuels, aux savants et historiens Issaks.
Chers frères Issaks, comment, en si peu de temps, avez-vous oublié votre propre histoire en passant du statu d’oppressés à celui, peu enviable, d’oppresseurs?
Chers frères Issaks, comment pouvez-vous creuser la tombe de vos frères Issas qui vous ont sauvé hier ?
Il va de soit qu’un massacre des Issas au Somaliland va entrainer inévitablement la réaction des tous les Issas indépendamment de leur lieu de vie (Ethiopie, Djibouti, etc).
Et c’est plus particulièrement le cas de Djibouti qui m’inquiète le plus où cohabitent pacifiquement différentes communautés et particulier des Issaks et des Gadaboursi.
Je lance un vibrant appel aux amoureux de la paix dans la région avant qu’il ne soit trop tard.
Certains se jetteront sur mon écrit en disant: halte au Raciste.
Je leur répond tout simplement: Mieux vaut prévenir que guérir.
Le rôle des intellectuels est de dire la vérité même si elle ne plait pas à tout le monde.[/b]