Et de deux : la suite de la nouvelle de DAF , cela mérite quelques secondes d'attention malgré la densité du texte ....Bonne lecture ... à suivre
ILS, ELLES (Suite)
Un coup de klaxon, le tire de ses pensées. Il aperçoit dans le rétroviseur un bolide flambant neuf. C’est un véhicule à châssis haut, d’un blanc éclatant, un de ces tout-terrains de fabrication japonaise dont le nombre croit sur les routes de France. Il en reconnait le conducteur qui lui sourit familièrement. Il lui fait signe de le suivre.
Youssouf est issu du même pays que Liban, qui apprécie beaucoup sa compagnie. Il aime se faire appeler Joseph. Il parle fort mal la langue de sa mère comme celle du père. Il en connaît quelques mots, qu’il prononce avec l’accent d’un enfant mal assuré dans ses acquis linguistiques. Il communique en français. C’est sa langue, du moins la considère-t-il comme telle.
Youssouf est né en France, dans une de ces villes de garnison où son père, sous-officier dans l’armée française, était en service. Il y a grandi, séjournant parfois, au gré des affectations du père, dans un département ou un territoire d’Outre-mer, comme les Français appellent les anciennes colonies où flotte encore leur drapeau tricolore.
Son père a décidé que sa progéniture penserait et s’exprimerait en français, et seulement en français. Il a décidé qu’elle le manierait sans accent et sans hésitation. Aussi a-t-il froidement banni l’usage à la maison de son idiome maternel et de celui de son épouse. Cette dernière n’était pas de son avis, mais elle s’est tue.
En fille élevée dans l’obéissance à l’homme, celle qui a enfanté Youssouf a toujours obéi à son époux. Elle avait vu sa mère obéir, sa grand-mère de faire de même, elle avait toujours entendu son père dire que la femme ne valait que par l’homme. Elle a voué une obéissance sans nuages au garçon fier de son uniforme que ses parents lui ont présenté un jour comme l’homme de sa vie. Elle l’a suivi en France dont elle ne parlait pas la langue. Elle s’en est remise à lui en toute chose. Il était à la fois l’époux et le maître à penser. Comme d’autres garçons de sa génération, son militaire de mari avait été à l’école du colonisateur et en avait appris la langue. Pas elle. L’école des Blancs ne convient pas aux filles, lui avait expliqué son géniteur sur un ton péremptoire. Il l’avait inscrite dans un établissement coranique, une madrassa, où elle avait tôt engrangé tous les versets du Coran et un brin d’arabe littéraire. C’est au contact des gens et de ses enfants qu’elle s’est initiée au français.
De voir sa progéniture se façonner à l’occidentale, emplissait de fierté le père de Youssouf. Il éprouvait du bonheur à leur francophonie totale comme à leur connaissance des codes locaux. Ce sont de petits français, aimait-il à dire quand il se retrouvait avec des membres de sa famille ou des compatriotes. Il l’affirmait sans l’ombre d’un doute, tout persuadé de prononcer une parole d’or. Il n’avait pas le sentiment d’avoir fait fausse route mais la certitude d’avoir fait le bon choix. A travers ses enfants, il se voyait du même côté de la barrière que ces camarades français non blancs qu’il enviait tant à l’école parce qu’ils représentaient ce qu’il eût souhaité être : français de France en dépit de la peau.
Youssouf a achevé ses études. Il est aujourd’hui ingénieur dans une entreprise établie au pays de naissance et de nationalité. Il connaît bien Liban qu’il considère comme un ami, davantage que comme un concitoyen. L’un et l’autre aiment de la vie ce que, selon leur perception, elle a d’agréable.
Ils se garent devant un café chic pour prendre une boisson et parler. Youssouf rentre de mission à l’étranger. Il revient d’Afrique où il a accompagné le directeur général de la société qui l’emploie. Liban est impatient de l’entendre.
-Alors, ce voyage ? le presse-t-il à peine attablé.
-Très piquant.
-Allez, raconte-moi.
-Je n’ai pas senti le temps passer. Nous avons été accueillis comme des rois. Hébergement dans un hôtel à cinq étoiles, gastronomie de qualité, réception chez le président de la République, sorties à volonté, c’était un séjour de rêve.
-Une mission importante alors ?
-La signature d’un contrat juteux de dix millions d’euros. Un contrat qui demande peu mais rapporte beaucoup.
-Un camouflage, comme dit mon père.
-Si tu veux. La présidence s’est adressée à mon patron, qui connaît bien l’Afrique, pour monter un projet de couverture. En clair, un projet qui permette d’utiliser de l’argent public à des fins particulières.
-Waaouu, j’entends parler mon père ! Alors, cela coule à flot là-bas aussi ?
-Il y a de l’argent au pays où j’ai été. Ils ont du pétrole et d’autres produits précieux. Le palais présidentiel est immense et les gens qui le fréquentent sont riches, du moins ceux que j’ai vus. Ils roulent sur l’or.
-J’en déduis que, comme chez nous, le président est attentif à son entourage. Ce qui est logique, car le gâteau, ou plutôt la viande comme dit papa, doit profiter à soi et aux siens.
-Du gâteau, les gens que j‘ai rencontrés là-bas en ont jusqu’au dégout. Et ils s’en servent. Ils le font d’autant plus qu’ils ont le gout du plaisir. De vrais noceurs !
-Ha ! Ha ! Raconte s’il te plaît, et par le menu.
-Il faudrait des heures pour te raconter par le détail tout ce que j’ai vu là-bas, et j’ai peu de temps car je dois retourner au bureau. Disons, pour faire court, qu’ils vivent intensément, de jour comme de nuit.
-Waaouu ! Vous vous êtes régalés alors, ton patron et toi ?
-Nous nous sommes bien amusés, en hôtes du père de la nation. Belles plages, beaux paysages, créatures de rêve, cadeaux en tous genres… nous avons été gâtés comme des enfants que l’on adore.
-La totale, quoi ? C’est fou ce que le pays d’où tu reviens, ressemble au nôtre. Qui peut dire que les leaders africains ne savent pas apprécier la vie ? Ils vivent et font vivre les leurs. Ils gèrent en bons pères.
-Mais, semble-t-il, il y a une autre face, l’envers du décor. Il y aurait beaucoup de misère. C’est quelqu’un qui me l’a dit, un employé de l’hôtel. Il m’a expliqué que ce que je voyais n’était pas représentatif du pays réel. Il me l’a raconté en des termes si forts que j’en ai été ébranlé.
-Un rabat-joie, comme il y en a aussi chez nous.
-C’est vrai qu’il m’aurait gâché le plaisir du séjour, si je ne m’étais ressaisi. J’ai prétexté un appel téléphonique et mis fin à la conversation. Puis, j’ai joué les esprits occupés jusqu’à la fin du séjour.
-Moi, je me ferme, me fais hermétique à ce qui me déplaît. Les petits importuns qui cherchent à me faire la morale, se heurtent à un mur. C’est efficace pour décourager leurs assauts.
-Nous nous ressemblons sur ce point, comme sur d’autres. La vie est trop courte pour que nous nous épuisions en vaines interrogations. Il faut la vivre comme elle vient, à pleines dents. La politique aux politiciens, notre choix de vie n’est pas de jouer les Che Guevara.
-Tout à fait. Profitons de la vie, comme le ferait quiconque en aurait les moyens. La politique au chef de l’Etat et à ses ministres.
Ils se font l’accolade, se séparent par un grand sourire. A suivre.
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Et De Deux ; Suite De La Nouvelle (deuxième épisode) une autre manière de reflèter une réalité poignante !!!
#2
Posté 21 janvier 2007 - 01:47
Garaad, le Friday 19 January 2007, 22:02, dit :
Et de deux : la suite de la nouvelle de DAF , cela mérite quelques secondes d'attention malgré la densité du texte ....Bonne lecture ... à suivre
ILS, ELLES (Suite)
Un coup de klaxon, le tire de ses pensées. Il aperçoit dans le rétroviseur un bolide flambant neuf. C’est un véhicule à châssis haut, d’un blanc éclatant, un de ces tout-terrains de fabrication japonaise dont le nombre croit sur les routes de France. Il en reconnait le conducteur qui lui sourit familièrement. Il lui fait signe de le suivre.
-Un camouflage, comme dit mon père.
-Si tu veux. La présidence s’est adressée à mon patron, qui connaît bien l’Afrique, pour monter un projet de couverture. En clair, un projet qui permette d’utiliser de l’argent public à des fins particulières.
-Waaouu, j’entends parler mon père ! Alors, cela coule à flot là-bas aussi ?
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Ils se font l’accolade, se séparent par un grand sourire. A suivre.
ILS, ELLES (Suite)
Un coup de klaxon, le tire de ses pensées. Il aperçoit dans le rétroviseur un bolide flambant neuf. C’est un véhicule à châssis haut, d’un blanc éclatant, un de ces tout-terrains de fabrication japonaise dont le nombre croit sur les routes de France. Il en reconnait le conducteur qui lui sourit familièrement. Il lui fait signe de le suivre.
-Un camouflage, comme dit mon père.
-Si tu veux. La présidence s’est adressée à mon patron, qui connaît bien l’Afrique, pour monter un projet de couverture. En clair, un projet qui permette d’utiliser de l’argent public à des fins particulières.
-Waaouu, j’entends parler mon père ! Alors, cela coule à flot là-bas aussi ?
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Ils se font l’accolade, se séparent par un grand sourire. A suivre.
Encore une manière tout à fait mesquine de faire de la politique.C'est un secret de polichinelle ces façons maladroites de faire entendre la voix d'un soit disant futur président.Cela me rappelle un vieux politicien djiboutien qui avait soulevé un journal local et qui avait crié devant la foule: Première page: Kumayo et son mari.Allah irahamou pour tous les deux.Mais, le ridicule ne tue pas...
Ma souffrance sera égale à la tienne, ni plus, ni moins.
#3
Posté 22 janvier 2007 - 01:25
Cela me rappelle plutôt cette qualité de jugement de nos dirigeants. Cette façon de sauté à la gorge de la première remarque. C'est assez surnois, mais je me demande si c'est volontaire, ou si c'est le fruit d'un conditionnement dont tu as fait l'objet. Je me demande lequel de nos présidentiables, fait preuve d'une adresse. Tu te trompe de débat, et tu te trompe de cible. Inaga dhaaf kas maliil nimada
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